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L'histoire des débuts de Bougeotte et Placotine

Lundi le 7 mars 2022

Par : Sarah Baribeau, fondatrice de Bougeotte et Placotine et kinésiologue

 

2008-2010

Je viens de terminer mon baccalauréat en kinésiologie. Mon chum n’a pas terminé ses études et j’aimerais bien faire au moins une autre saison avec l’équipe de Cross Country du Vert et Or. Je me lance, je m’inscris à la maîtrise. Ayant hésité lors de mon inscription à l’université entre administration, communication et kinésiologie, je décide d’orienter ma maîtrise en communication. Je m’inscris donc à une propédeutique afin de faire les cours de base et avoir accès à la maîtrise. Après une session, je me rends compte que je ne pourrai pas faire la maîtrise que je souhaite, je décide alors de continuer en kinésiologie. Je m’inscris donc à la maîtrise et du même coup au micro-programme en exercices thérapeutiques. Je débute ma maîtrise que j’oriente sur la prévention des blessures à la course à pied, mon dada. 

Après une session, deux de mes amies du baccalauréat (salut Cath et Ge) tombent enceintes. On capote un peu et commençons à placoter de leur entraînement enceinte. Rapidement, je me rends compte qu’on ne connait pas grand chose. On discute de ce qu’on entend : qu’on ne devrait pas courir durant le premier trimestre car cela pourrait provoquer des fausses-couches. Selon moi, ça n’a aucun sens. Ma réflexion porte sur le fait que le corps est si bien fait, que ça fait des milliers d’années que les femmes enfantent; le corps n’est pas si fragile. Suite à nos discussions, je ressens un très grand besoin de connaître la vérité sur le sujet. Je rencontre alors mon directeur de maîtrise et décide de réorienter celle-ci vers le domaine de la périnatalité. Suivant simultanément les cours du microprogramme et ceux de ma maîtrise, mon sujet devient: «l’approche du kinésiologue-kinésithérapeute dans la prévention des maux de dos et du bassin durant la grossesse. »

Je me mets au boulot. Un monde s’ouvre à moi. Revenons il y a 12 ans, le message aux femmes enceintes était: ne cours pas, il faut éviter l’intensité, ne pense pas aux sauts et attention aux fuites. Ce que je découvre dans les études, et notons qu’à ce moment (et encore aujourd’hui), très peu d’études s’intéressent à la santé des femmes: les recommandations d’activité physique durant la grossesse, le rôle des abdominaux profonds, l’importance de la progression en postnatal, ce qu’est le «core» et le mécanisme entre les muscles duquel il est composé. Je lis sur l’importance du massage, de la mobilité et du renforcement des muscles profonds. J’apprends ce qu’est la relaxine, comment fonctionne le plancher pelvien et ce qu’est une diastase. Je lis même des études sur l’utilisation des surfaces instables et du TRX. 

Comprenez moi, je suis abasourdie, passionnée et je n’en reviens pas que les femmes ne sachent pas comment fonctionne leur propre corps! En plus, quelle révélation, on peut s’entraîner enceinte! Il reste à comprendre comment le faire adéquatement, en incluant une belle progression afin d’éviter les problématiques en postnatal . Halleluya! Je dois répandre la bonne nouvelle! 

24 Juin 2010

Test de grossesse positif! Let’s the adventure begin! 

J’ai eu énormément de nausées et de fatigue durant ma grossesse, et j’ai eu bien de la difficulté à l’accepter. Malgré mes connaissances, je n’ai pas eu la grossesse active espérée. J’ai tout de même réussi à marcher tous les jours, avec mon gros chien, dans les champs de ma campagne Sherbrookoise et ce, jusqu’à 40 semaines de grossesse. J’étais toujours à la maîtrise et tous les jours j’en apprenais un peu plus sur le corps de la femme. 

Parce que le besoin de comprendre le corps est très fort chez moi et que je suis une personne grandement connectée à mon propre corps et à ses limites, j’ai eu besoin d’approfondir mes connaissances autour de l’accouchement. J’ai décidé d’aller visiter la maison de naissance de la région et j’ai été convaincue. Pour moi, vivre un accouchement le plus près de la nature possible est ce dont je ressentais le besoin. Être connectée à mon corps était vraiment quelque chose de ressenti et aligné avec mon intuition. Ma famille était hésitante quant à mon choix. J’ai proposé à ma mère de nous inscrire à une formation d’accompagnante à la naissance. J’avais vraiment besoin que l’on m’explique comment le corps de la femme fonctionnait. Cette formation a renforcé mon choix et a permis à ma mère et ma famille de mieux m’accompagner dans ma démarche.

8 Mars 2011

Ça y est, au 100e anniversaire de la journée internationale des droits des femmes, je mets au monde ma première fille, accompagnée de ma mère et mon chum sur la chanson «lightning crashes» (allo synchronicité, vous écouterez les paroles). Comme plusieurs femmes, quelque chose de très puissant s’est installé en moi. Je ne me suis jamais sentie aussi forte. À partir de ce moment, je vous confirme que je me pensais vraiment bonne :). Passionnée du dépassement de soi, des défis sportifs et des limites du corps humain, j’avais vécu le moment le plus intense de ma vie, avec les plus grandes douleurs, et j’avais survécu. Wow le potentiel du corps de la femme! Jamais je ne me suis sentie aussi connectée à ma nature profonde. À partir de ce moment, j’ai compris que mon corps, mais aussi ma tête n’avaient pas vraiment de limites et que je pouvais réaliser ce que je voulais dans la vie. Il est certain que vous me trouvez intense….je le suis. 

Les premières semaines postnatales ne furent pas roses. Autant j’avais vécu un accouchement puissant, autant je n’avais aucune idée de ce qu'était qu’être une mère. Je n’y connaissais rien. Les premières semaines furent émotivement très difficiles et je suis passée très près d’une dépression postpartum. Ma sage femme (merci encore) m’a poussée à laisser bébé à mon chum après l’allaitement et à aller courir (et puis merde le plancher pelvien, la santé mentale avant tout! ). 

Quand tout  ça s’est stabilisé un peu et que mon chum et moi avons recommencé à dormir (un peu plus), je lui ai proposé d’aller nous installer à Québec. Je lui ai dit que je n’étais plus capable de la campagne et de mon rang et je voulais aller m’installer en ville, j’avais besoin de social, je n’étais plus capable de l’isolement et je voulais partir une entreprise. Je voulais créer un environnement pour sortir les mères de leur isolement, pour les informer sur leur corps, pour les entraîner grâce aux informations à jour que j’avais apprises. À ce moment-là, les seuls cours offerts aux femmes enceintes étaient l’aquaforme et le yoga et pour les mamans, le yoga avec bébé, l’aqua poussette et des cours avec poussette. Rien n’existait quant à l’entraînement fonctionnel pour la mère. Il n’existait pas de programme conçu pour travailler les bons muscles, au bon moment. En plus, rien n’existait pour accompagner les femmes dans leur remise en forme postnatale, rien!! Les indications étaient alors: attends 4 à 6 semaines et reprends! Le mot «progression» était toujours bien absent. Il était temps que ça change.

24 juin 2011

Mon chum a répondu: « Ok pour la ville mais t’es mieux de starter ta patente.» Avec aucun emploi qui nous attendait, on a quand même réussi à s'acheter un condo au centre ville et mon chum s’est trouvé un poste juste à côté! 

Premier «faux congés» de maternité. 

Mon chum et moi, on s’est partagé le congé rapide, à partir de septembre, fini la RQAP, je devais me mettre à l’ouvrage! Merci maman pour tous les vêtements achetés à bébé et les soupers fournis à partir de ce moment! D’ailleurs, ce projet, je le lançais avec ma mère.  Ainsi, elle, Maxim et moi, on s’est mises au travail. Plan d’affaires, recherche de soutien financier (sans succès), on a fait bien des rencontres avec des banquiers avec bébé qui se promenait sous la table, décidées à lancer ce projet. D’ailleurs, c’est en allaitant dans le salon chez ma mère que l’idée du nom «Bougeotte et Placotine» est venue. 

Pour les gens en affaires, vous savez ce qu’était la suite. Recherche de local, trouver les fonds, convaincre un propriétaire de nous louer son espace, plans, ameublements, matériel, image de marque, trouver des kinésiologues, faire un site internet, faire des plans de cours et se faire connaître. Je vous rappelle que j’étais kinésiologue et que je n’avais pas vraiment de notions en administration des affaires. 

Dès que mon site a été prêt, même si je n’avais pas encore mon local, j’ai commencé à écrire un blogue, question de commencer à partager mes connaissances et à brasser les affaires dans le monde de la prise en charge de la santé de la femme. J’ai osé écrire sur la course durant la grossesse, l’allaitement, les abdominaux, le plancher pelvien, les chaussures chez les enfants. J'ai aussi créé la page facebook de Bougeotte et Placotine! En 2012, je vous confirme que les médias sociaux n’étaient pas ce qu’ils sont aujourd’hui.

Avril 2012

Mon propriétaire, pour me donner un coup de pouce, a payé les frais d’un relationniste, j’ai nommé Jean Brouillard (trop smath) et on a organisé un événement «casse la croûte avec Bougeotte et Placotine». J’ai fait aller mon réseau de mamans et ça y est, le 12 avril, Bougeotte et Placotine à Sillery ouvre ses portes et est rempli de journalistes. Quel succès, je suis encore aujourd’hui très reconnaissante de ce coup de pouce de mon propriétaire du moment et de mes amis et collaborateurs. 

28 avril 2012

Première session à vie chez Bougeotte et Placotine. J’ai 2 ou 3 entraîneurs avec moi! On donne une vingtaine de cours par semaine. De mon côté, j’en donne une quinzaine, entre mes cours je travaille au café avec ma mère qui elle, s’occupe de la comptabilité. La nuit…je prends mes courriels. Je ne vous parlerai pas de mon salaire. De toute façon, je sortais des études, vivre avec peu c’était tout ce qu’on connaissait. 

J’étais convaincue de mon affaire et j’étais vraiment nourrie par cette aventure. J’ai  commencé à faire le tour des cliniques de physiothérapie et j’ai cogné aux portes de toutes les cliniques médicales. Je voulais les informer, je voulais qu’on soit sur la même longueur d’onde. Voilà 10 ans, je vous le garantis, les physiothérapeutes périnéales n’étaient pas en demande comme aujourd’hui, et les médecins, pas autant informés et intéressés par la santé de la mère. 

Je sais qu’aujourd’hui, c’est acquis pour plusieurs personnes, mais je suis fière de dire qu’avec certaines physios périnéales, sans vouloir les nommer, Stéphanie, Alexandra, Josyane et Josée, on a poussé fort durant ces années pour que les choses changent. Aujourd’hui quand je vois l’engouement et la prise en charge auprès des mères, que j’écoute des podcasts de coureuses qui compétitionnent enceintes,  je suis fière d’avoir été, avec ces filles, des pionnières sur le sujet dans la région.

Durant les premières années de Bougeotte et Placotine, Blaise et Isa de la Clinique du Coureur m’ont aussi soutenu. Quoi qu’ils me connaissaient peu, ils me transféraient les courriels des mamans qui avaient des questions sur le retour à la course. Blaise m’a même déjà invité à l’accompagner à une émission de télévision pour parler de course enceinte, je suis reconnaissante de leur soutien. Je blague souvent en disant que j’ai été la première à offrir un programme fractionné aux nouvelles mamans avec mon cours d’initiation à la course et qu’aujourd’hui, je suis de leur équipe d’expertes pour la formation sur la course au féminin :). 

Le cours Premiers Pas de Maman que j’ai créé a vraiment aidé à propulser l’entreprise et sa réputation. Je suis reconnaissante d’avoir eu des médecins de famille qui sont venues y participer et, ayant constaté ma rigueur dans mon approche, en on parlé autour d’elles. Ces femmes font partie du succès de l’entreprise. Merci à celles qui ont poussé afin que je puisse venir offrir des conférences à leurs collègues et même aux gynécologues, qui m’ont invité à parler aux étudiants et aux médecins, qui me font confiance et qui croient au pouvoir de l’interdisciplinarité.

Bien entendu, à mes premières clientes, qui ont cru au projet, qui sont devenues des amies, qui passaient leurs journées à suivre mes cours, les ateliers, qui participaient au club de course et qui ont bu un bien grand nombre de cafés et de smoothies sur les divans de Bougeotte et Placotine, Merci les filles, Caro, Christine, Fanny, Emmanuelle, Isa, Julie, Marie-Paule, Dhiya, Claudia, Marie-Pier, Maude, Noémie et j’en oublie sûrement mais je vous aime.

Merci à toute la grande équipe de kins, coachs, franchisées qui continue de faire rayonner l'entreprise et participe grandement à sa croissance et ce toujours dans le respect de sa mission! 

Cette année, au 28 avril 2022, 10 ans pile-poil depuis l’ouverture de Bougeotte et Placotine, je suis invitée comme récipiendaire au Gala de rayonnement de l’Université de Sherbrooke. «Ce gala permet de reconnaître le travail de ceux et celles de chaque faculté qui  tracent la voie de l’excellence pour les générations futures et reconnaît l’apport exceptionnel de ces hommes et femmes à la société». Entendez-moi bien, je n’en reviens pas encore et je suis extrêmement touchée de cette reconnaissance. 

Bougeotte et Placotine a 10 ans, et depuis 10 ans, il y a eu beaucoup de défis, comme il y a eu énormément de moments de joie. 3 enfants et 6 Bougeotte et Placotine plus tard, ce n’est pas terminé! J’ai encore le feu, j'ai la chance d'avoir une équipe du tonnerre et j’ai l’intention de continuer ma mission ! Je vais continuer de me battre et de tenter de changer les choses concrètement afin que les femmes puissent avoir accès à toute l’information qui leur est dûe, qu’elles aient accès à du soutien, que l’on s’intéresse à leur santé physique et mentale et surtout, qu’elles comprennent qu’elles sont incroyables et peuvent faire ce qu’elles veulent dans leur vie, développer leur plein potentiel et reprendre le pouvoir qu’elles méritent! 

Bonne fête Bougeotte et Placotine

 

 


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